Le 31 octobre au plus tard, le Royaume-Uni sortira de l’UE. Deux scénarios sont envisagés. En l’absence d’accord de retrait, il n’y a pas de période de transition et dès le 1er novembre 2019, le droit de l’UE cesse de s’appliquer au Royaume-Uni, en cas d’accord de retrait, signé avant le 31 octobre, ce n’est qu’à l’issue d’une période de transition prévue jusqu’au 31 décembre 2020, qui peut être étendue de un à deux ans que le droit de l’UE cessera de s’appliquer.
Avec ou sans accord, aujourd’hui, dans 6 mois ou un an… quelles seront les conséquences du Brexit sur les retraites des expatriés qui cotisent ou ont cotisé au Royaume-Uni au cours de leur carrière ?
La situation actuelle
Un Français expatrié au Royaume-Uni qui prend sa retraite bénéficie aujourd’hui des règlements européens de sécurité sociale.
En conséquence, les trimestres cotisés dans l’ensemble des pays ayant part aux accords communautaires (Union Européenne, mais aussi Islande, Liechtenstein, Norvège et Suisse) sont totalisés pour évaluer le droit à une retraite au taux plein en France.
Prenons l’exemple de Denis : avant son arrivée à Londres, il avait travaillé en France pendant 30 ans puis était parti 4 ans en Allemagne avant de venir s’installer à Londres pour créer son entreprise. Denis pense demander ses retraites françaises à l’été 2023. À cette date, en additionnant l’ensemble de ses périodes de cotisation auprès des différents systèmes de retraite européens, il aura validé les 168 trimestres requis pour bénéficier de ses retraites françaises au taux plein.
Aujourd’hui, Denis craint que, suite au Brexit, les trimestres cotisés en Angleterre ne soient plus reconnus et que cette situation le contraigne à attendre 67 ans pour demander ses retraites françaises. À cet âge, il aura, en effet, droit à une retraite au taux plein quelle que soit la durée validée.
Les mesures prises par le gouvernement et l’UE en cas de Brexit sans accord
Si aucun accord n’est ratifié, scénario de « no deal » ou « hard Brexit », le Royaume-Uni sortira de l’UE le 1er novembre 2019 sans période de transition. Dans ce cas, la Loi 2019-30 du 19 janvier 2019 a autorisé le gouvernement français à prendre, par ordonnance, des mesures de préparation au retrait. Ces mesures peuvent notamment concerner « la prise en compte, pour l’ouverture et la détermination des droits sociaux, des périodes d’assurance, d’activités ou de formation professionnelle exercées ou effectuées au Royaume-Uni jusqu’à six mois après la date de son retrait de l’Union Européenne. »
L’ordonnance n° 2019-76 portant sur les mesures relatives aux droits sociaux est parue au Journal Officiel du 7 février 2019 et son article 18 confirme cette mesure.
Le règlement européen (UE) 2019/500 du 25 mars 2019 établit des mesures d’urgence selon le même principe de sauvegarde des droits en matière de sécurité sociale.
Ainsi, même en l’absence d’accord, les anciens expatriés verront leurs périodes de travail au Royaume-Uni reconnues pour le droit aux retraites françaises au taux plein jusqu’à 6 mois après la date effective du retrait. Ce délai supplémentaire de 6 mois est destiné à permettre aux assurés concernés d’engager les démarches nécessaires : changement de résidence, mise en place de cotisation volontaire…).
Dans le cas de Denis qui a commencé à cotiser au Royaume-Uni en 2015 et en l’absence d’accord, les périodes allant de 2015 jusqu’au 31 avril 2020 au plus tard seront prises en compte. En cas d’accord, les périodes seront prises en compte de 2015 à l’issue de la période transitoire donc au moins jusqu’au 31 décembre 2020.
Cette analyse concerne le calcul des retraites françaises. La prise en compte des périodes françaises pour le calcul de la retraite du Pension Services dépendra des mesures décidées par les autorités britanniques.
Et ensuite ?
Après la sortie de l’UE, avec ou sans accord, le Royaume-Uni, devenu un État tiers, devra signer de nouveaux accords avec les États membres pour encadrer les futures relations.
Cas le plus probable, l’accord permettra au Royaume-Uni d’avoir part aux accords européens au même titre que la Suisse, la Norvège, le Liechtenstein ou l’Islande aujourd’hui.
En effet, les règlements européens s’appliquent aujourd’hui non seulement aux 28 (devenant 27) pays de l’Union Européenne mais également aux pays membres de l’Association Européenne de Libre Échange (Islande, Liechtenstein, Norvège) et à la Suisse.
Conséquence : la totalisation s’applique en cas d’expatriation en Suisse ou en Norvège, par exemple, comme dans les autres pays de l’UE, alors que les Norvégiens ont, à deux reprises, par des référendums en 1972 et 1994, refusé d’adhérer à la Communauté Européenne.
Dans cette hypothèse, rien ne changerait donc pour Denis : la totalité des trimestres cotisés en France, au Royaume-Uni et en Allemagne serait bien prise en compte. Il devrait toujours pouvoir bénéficier de ses retraites au taux plein dès 2023.
La question se pose néanmoins de la date à laquelle le Royaume-Uni signerait cet accord. En cas de signature après le 1er mai 2020 et en l’absence de nouvelle mesure d’urgence, Denis risquerait une non-reconnaissance des périodes de travail intervenant après cette date.
Penser à la cotisation volontaire ou au rachat de trimestres
Si faute de convention, le risque apparaissait de voir une partie de sa carrière au Royaume-Uni non reconnue pour le droit au taux plein, Denis pourrait mettre en œuvre deux solutions.
S’il est prévoyant, il s’intéressera à la cotisation volontaire. Son statut d’expatrié lui donne le droit de cotiser de façon volontaire auprès des régimes de retraite français.
Cette cotisation lui permettra de valider des trimestres qui seront pris en compte lors du calcul de sa retraite de la sécurité sociale comme s’il était salarié en France.
Le coût annuel de cette adhésion est de 17,75 % du revenu (plafonné à 40 524 € en 2019) et représente donc un montant maximal de 7 188 € en 2019.
Cette cotisation lui permettra, de plus, de compenser le « trou » de carrière dû à l’absence provisoire ou durable de convention.
S’il n’a pas été prévoyant, il lui sera possible, au moment du départ en retraite, de demander à racheter les éventuels trimestres manquants. Mais le coût sera plus élevé 4 510 € par trimestres en 2019 pour un assuré âgé de 62 ans.
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