Etat civil de Nantes, une maison déjà cinquantenaire

Le service central d’état civil est né de la décolonisation et de la politique d’aménagement du territoire … Installé à Nantes, pour partie dans un bâtiment construit spécialement en 1993, il constitue la plus grosse direction des Affaires étrangères avec ses 370 agents.

 

Cet article est extrait de notre magazine « La Voix de France ». Découvrez le sommaire du numéro 561. Devenez adhérents de l’Union des Français de l’Etranger pour reçevoir le magazine de l’UFE 4 fois par an.

 

Photo du batiment

Un immense paquebot, dans un quartier discret de Nantes : c’est là que se niche la « plus grande mairie » de France, hébergée par le ministère des Affaires étrangères et rattachée au ministère de la Justice. C’est dans la préfecture de Loire-Atlantique que l’administration a choisi d’installer en 1965, dans le cadre de la politique d’aménagement du territoire et de délocalisation, ce qui est le service central d’état civil, la mairie des nombreux Français nés à l’étranger, l’endroit où tous les actes qui ont trait au statut personnel des citoyens sont conservés. Les chiffres en disent long sur le rôle de ce service qui détient 15 millions d’actes, affiche 5 millions d’usagers nés à l’étranger dont près de 80 % résident sur le territoire national.

PLUS DE 2 MILLIONS DE DEMANDES TRAITÉES CHAQUE ANNÉE

Même si 80% des demandes sont aujourd’hui reçues par la voie électronique, ici, le papier reste central. Chaque jour, 3 000 à 4 000 demandes arrivent au courrier du matin. Les lettres sont déposées dans les sous-sols vers 7 h, et un premier travail commence : celui de la vérification. Tous les courriers sont ouverts et passés au scanner afin de s’assurer qu’ils ne recèlent aucun danger. Puis, lorsqu’ils sont « propres », ils sont envoyés à l’étage du Bureau du courrier. Là, le tri commence : huit personnes lisent les courriers et, en fonction de la demande, les déposent dans des bannettes : « notaires », « dossier Maghreb », « jugements divers »… Une deuxième lecture plus sélective se fait, puis cette masse de papier est envoyée vers 15 h dans les services compétents qui traiteront directement la demande. Les réponses demandent, elles aussi, un travail spécifique qui se fait d’ailleurs au même étage. Il y a une centralisation de l’impression et de la mise sous pli des réponses aux usagers afin d’être performant et de leur envoyer chaque jour les 5 000 à 10 000 documents dont ils ont besoin. Les délais de traitement sont très rapides, en général inférieurs à trois jours. En revanche, ce qui l’est parfois moins, ce sont les délais d’acheminement postaux vers certaines destinations …

LA DÉMATERIALISATION A DÉPASSÉ LE PAPIER

Aux côtés du bureau des Courriers, un centre téléphonique reçoit les appels des usagers : cinq jours sur sept, un personnel dédié répond aux questions qui ont le plus souvent trait à des demandes spécifiques, à des suivis de dossiers. Le taux de réponse est extrêmement satisfaisant puisqu’il dépasse les 85%. Mais le gros des demandes passe désormais par le Net. Dès 2001, à Nantes, on a joué la carte du web, en raison notamment du fait que les usagers étaient éloignés physiquement de ce centre. Les demandes émanent de plusieurs types de publics : il y a d’un côté les particuliers qui effectuent leurs demandes en ligne (extrait d’actes de naissance, de décès, divorces, mariages…), de l’autre les administrations qui sollicitent l’état civil afin notamment de vérifier certaines demandes (par exemple une préfecture qui a des doutes sur un extrait d’acte de naissance). Le service sert donc aussi à authentifier les actes et participe ainsi à la lutte contre la fraude administrative (il arrive par exemple qu’un acte établi à l’étranger soit réel, mais qu’il soit demandé à de multiples reprises… par des personnes différentes !). Ce sont aussi 13 000 mails par an qui sont envoyés par le bureau des Affaires juridiques dans les postes consulaires pour répondre à des questions complexes.
Les notaires sollicitent aussi énormément l’état civil. Pour fluidifier ces échanges, un programme spécifique permettra désormais de dématérialiser les actes (les notaires recevront directement, via le Net, des documents certifiés) ; une convention signée en décembre 2015 reliera l’ensemble des officines de notaires à l’application, permettant ainsi un traitement encore plus rapide de leurs demandes.

LE NUMÉRIQUE, UN OUTIL SECURISÉ ?

S’il y a encore des archives conservées non loin de Nantes, elles ne sont plus consultées qu’à la marge, par exemple pour des instructions de naturalisation. Elles ont été centralisées au moment de la fin de la colonisation, avec notamment le rapatriement des documents des ex-colonies. Mais même ces documents sont eux aussi, pour l’essentiel, numérisés. L’état civil comporte des informations essentielles et confidentielles, il résume toute la vie des individus. Il est important qu’il soit protégé, d’où la nécessité d’une très forte sécurisation si l’on va vers une dématérialisation totale. Pour cela, il faudra une évolution de la loi, et adopter des systèmes numériques inviolables pour que les particuliers puissent, un jour, imprimer eux-mêmes leurs documents. Si ce service n’est pas encore prêt, il ne saurait tarder à l’être ! Parallèlement, le service d’état civil travaille à la dématérialisation de ses données dès la création des actes. L’objectif est de mettre en œuvre un registre d’état civil électronique qui permettra de supprimer les registres papier.

votre contact UFE Loire-Atlantique : Nicole Borg-Olivier, présidente. w.spbsborgoliviern@wanadoo.fr

 

Le bureau Etablissement

Ce service crée 110 000 actes par an pour des événements survenus à l’étranger concernant des Français.

Il régularise également des situations très variées, comme les actes manquants de personnes nées dans les ex-colonies. Il réalise aussi des transcriptions judiciaires, les décès survenus aux armées ou suite à une catastrophe aérienne ou naturelle, les transcriptions d’actes consulaires pour les pays ne possédant pas de service d’état civil (comme Taïwan, les Territoires palestiniens ou encore la Syrie).

 

« Le nombre de Français à l’étranger croît, 
notre outil doit donc être modernisé. »
Entretien avec Alain Sterbik.

Sous-directeur de l'état civil de Nantes

Le point avec le sous-directeur de l’état civil et de la nationalité, chef de service central d’état civil.

LE SERVICE D’ETAT CIVIL NANTAIS EST-IL  IMPORTANT POUR LES FRANÇAIS DE L’ETRANGER ?
Nous sommes au service de tous les expatriés français, nous permettons à nos compatriotes d’accéder à leurs données, à la copie de tous les actes dont ils ont besoin au cours de leur vie. Nous travaillons à la dématérialisation de ces actes car cela facilitera aussi leur accès : aujourd’hui, lorsqu’on vit à l’étranger, on peut attendre parfois plusieurs semaines avant de recevoir son courrier, ce qui est ennuyeux pour des documents dont la durée de vie est assez courte. Lorsqu’il s’agit de pays réputés pour la faiblesse de leur administration postale, nous passons par les valises diplomatiques. Mais le numérique est au centre de nos réflexions pour l’aménagement de nos services. Nous travaillons par exemple à la centralisation directe des données : nous voulons, à terme, que tous les actes réalisés dans les consulats s’enregistrent directement dans un fichier central pour que toutes les administrations puissent y avoir accès facilement. Par exemple, il faut savoir que les Pacs passés à l’étranger sont centralisés au TGI de Paris : notre projet de centralisation est de permettre aux consulats d’avoir aussi accès à cette base de données.

À LA DIFFERENCE D’UNE MAIRIE, IL N’EST PLUS POSSIBLE D’AVOIR D’INTERLOCUTEUR PHYSIQUE A NANTES. EST-CE UNE BONNE CHOSE ?
Il y a encore quelques années, nous avions à Nantes un guichet qui permettait aux citoyens de venir retirer leurs documents. Ce service était sous-utilisé, nous l’avons fermé pour renforcer nos équipes d’accueil téléphonique. Ce que nous cherchons, de façon générale, c’est d’éviter aux citoyens des déplacements, ou encore d’effectuer des demandes multiples. Ainsi, si l’un de nos compatriotes né à l’étranger a besoin d’un document pour son notaire, nous l’envoyons directement à ce dernier par la valise diplomatique : les consulats facilitent les démarches.

CE SERVICE A-T-IL DES LIENS PARTICULIERS AVEC CERTAINS PAYS ?
Nous avons un lien particulier avec l’Afrique. Nous avons un service spécifique, le Bureau des transcriptions pour le Maghreb, qui traite directement les demandes de transcription des actes dressés en Algérie, au Maroc  et en Tunisie alors que pour les autres pays, les transcriptions se font dans les pays concernés. Cela représente environ le quart de l’activité mondiale de transcription.

QUEL AVENIR POUR LE SERVICE CENTRAL ?
Nous avons de l’ambition pour les années  à venir. Des moyens performants doivent être mis au service des Français de l’étranger.
La centralisation et la dématérialisation permettront une plus grande indépendance de notre communauté à travers le monde.

Etat civil de Nantes. 50eme anniversaire
Visite de M. Mathias Fekl (Secrétaire d’Etat chargé du Commerce extérieur, de la promotion du Tourisme et des Français de l’étranger), Mme Elisabeth Lefranc (adjointe aux Ressources humaines, Mairie de Nantes) et M. Alain Sterbik.

Nos thématiques