L’âge de départ à la retraite est au cœur des débats entre les deux candidats encore en lice pour l’élection présidentielle. Emmanuel Macron propose de repousser progressivement l’âge de départ à 65 ans alors que Marine Le Pen envisage de le maintenir à 62 ans avec la possibilité de partir dès 60 ans avec 40 annuités. Faisons le point sur la situation actuelle et comparons avec nos voisins européens.
Réglementation actuelle en France
Aujourd’hui en France, l’âge légal de départ à la retraite est fixé à 62 ans. En dehors des cas spécifiques de carrière longue, handicap, invalidité, ou régimes spéciaux, c’est l‘âge minimal à partir duquel pour pouvez faire valoir vos droits.
Cependant, si vous n’avez pas la durée de carrière requise pour bénéficier d’un calcul de votre retraite sur la base du taux plein (50 % dans le régime général, 75 % dans la Fonction Publique), votre retraite sera calculée sur la base d’un taux minoré. Cette minoration du taux est définitive. Selon les régimes, elle varie de 1 % à de 1,25 % par trimestre manquant.
Quelle que soit votre durée de carrière, le taux plein est garanti à 67 ans soit 5 ans après l’âge d’ouverture des droits.
Âge effectif de départ
Même sans réforme, l’âge moyen de départ à la retraite est au-dessus du minimum fixé par la loi et augmente au fil des ans. En 2021, l’âge moyen de départ à la retraite était, en effet, de 62,9 ans. Le Conseil d’Orientation des Retraites prévoit qu’à législation constante, l’âge conjoncturel de départ à la retraite passerait à 63,7 ans en 2035, à 63,9 ans en 2070. Il serait alors comparable à la moyenne des âges de départ dans les 38 pays membres de l’OCDE, à savoir, 63,8 ans pour les hommes et 62,4 ans pour les femmes.
Qu’en est-il chez nos voisins européens ?
Dans la majorité des États membres, l’âge légal de départ à la retraite avoisine les 65 ans et l’âge réel de départ peut être beaucoup plus important. 19 États membres ont décidé de reculer l’âge légal dans les années à venir et certains ont déjà commencé à le faire de manière progressive, pour aller jusqu’à 67 ans et même au-delà pour certains, comme en Italie et au Danemark.
Quelques exemples :
Allemagne : l’âge légal est en recul progressif de 65 ans à 67 ans depuis 2012. Aujourd’hui, la génération 1956 part à 65 ans et 10 mois ; en 2024, la génération 1958 attendra 66 ans en 2024 et la génération 1964 partira à 67 ans en 2031.
Espagne : également un recul progressif de 65 ans depuis 2013 à 67 ans en 2029, pour la génération 1962. Certains assurés peuvent demander leur retraite dès 65 ans, s’ils peuvent justifier de 462 mois de carrière.
Angleterre : un recul vers 68 ans est à l’étude mais n’a pas encore été voté. Pour le moment, le recul est progressif mais s’arrête à 67 ans. Ainsi, la génération née à partir de mars 1961 partira à 67 ans en 2028.
Pays-Bas : un recul jusqu’à 67 ans en 2024. À partir de 2025, l’âge légal de la retraite sera lié à l’espérance de vie, soit 8 mois de report par année d’allongement de celle-ci.
Autriche : pour les femmes, recul progressif de l’âge légal de 60 à 65 ans entre 2024 et 2033. Cet âge est déjà de 65 ans pour les hommes. Ces derniers peuvent demander à partir dès 62 ans, sous conditions, mais ils subissent alors une minoration.
Qui pourrait être concerné par le recul à 65 ans ?
Emmanuel Macron proposait avant le premier tour de repousser l’âge de la retraite à 65 ans mais évoque aujourd’hui une limite à 64 ans.
Ce recul serait progressif et toutes les générations ne seraient pas concernées de la même façon. Les annonces du mois de mars parlaient d’un recul au rythme de quatre mois par année de naissance jusqu’à atteindre les 65 ans pour la génération née en 1969. Au lieu de demander leur retraite en 2031 à 62 ans, ces assurés devraient attendre 2034.
Si le recul s’appliquait dès la génération 1961, qui aura 62 ans en 2023, il est possible que seuls les assurés nés à partir de juillet 1961 soient concernés par un recul à 62 ans et 4 mois. En effet, les organismes de retraite recommandent de déposer sa demande de retraite entre 4 et 6 mois avant la date d’effet souhaitée pour le versement des premières pensions. Les assurés de la génération 1961 nés en début d’année déposeraient ainsi leur dossier alors que la réforme serait en cours de discussion. Pour cette raison, il est possible que, comme en 2011, le recul ne s’appliquerait qu’aux assurés nés sur la deuxième partie de l’année.
Ainsi, lors de la réforme de 2010, Éric Woerth avait appliqué ce même principe d’un recul de 4 mois par génération pour faire passer l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Étaient concernées, les personnes nées à partir de juillet 1951.
Quel serait le futur dispositif de départ anticipé ?
Aujourd’hui, un assuré, né en 1962, qui a commencé à travailler avant 20 ans peut bénéficier d’un départ anticipé au titre des carrières longues à partir de 60 ans, dès qu’il justifie des 168 trimestres lui donnant droit au taux plein.
Le dispositif de départ à 60 ans avec 40 annuités (160 trimestres) annoncé par Marine Le Pen devrait voir augmenter de manière importante le nombre d’assurés éligibles au départ à 6o ans.
Cette réforme impacterait les régimes de retraite complémentaires qui versent une partie importante des retraites des salariés. Rappelons qu’en 1981, quand l’âge de départ avait été avancé de 65 à 60 ans, ces régimes avaient instauré une cotisation supplémentaire pour financer cette avancée de l’âge.
Ceux qui ne rempliraient pas la condition de 40 annuités, seraient éligibles à un départ à 62 ans comme aujourd’hui.
Si, comme l’envisage Emmanuel Macron, l’âge légal recule de 62 ans 65 ans, ce recul concernera-t-il également le départ au titre des carrières longues qui passerait alors de 60 à 63 ans ?
Quels seraient les assurés concernés par ce recul ? Fin 2022, si le projet de loi était à l’étude, certains assurés nés en 1961 ou 1962, auraient déjà obtenu leur retraite à 60 ans.
Le recul pourrait donc s’appliquer aux assurés nés en 1963, qui auront 60 ans début 2023 : ils ne déposeront leur dossier que fin 2022.
L’âge du taux plein garanti serait-il impacté ?
Aujourd’hui, nous l’avons vu, quelle que soit la durée de carrière, une retraite sans minoration est garantie à ceux qui attendent 67 ans, 5 ans après l’âge d’ouverture des droits, pour la demander.
Si l’âge de départ recule de 3 ans, est-ce que ces assurés devront attendre 70 ans ? Dans le projet de Marine Le Pen, il n’est pas fait mention d’une modification de ce curseur.
- 13 avril 2022