Toute personne saine d’esprit a la possibilité de désigner à l’avance un ou plusieurs représentants pour le jour où elle ne sera plus en état physique ou mental de s’occuper seule de ses intérêts ou de ceux des enfants dont elle a la charge. Il s’agit du mandat de protection future qui, selon la forme qu’il revêt (acte sous seing privé, acte contresigné par un avocat, acte notarié), conférera des pouvoirs plus ou moins étendus au représentant (mandataire) choisi.
Un geste simple mais qui peut vous garantir d’abus éventuels et protéger ceux que vous aimez.
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Accident de la vie, maladie, ou tout simplement conséquence de l’âge, chacun d’entre nous peut être amené à perdre temporairement, ou définitivement, ses facultés personnelles. Pour préserver alors ses intérêts et son patrimoine (mandat pour soi-même) ou ceux de ses enfants à charge (mandat pour autrui), la loi du 5 mars 2007 réformant les tutelles a instauré le mandat de protection future dont la mise en oeuvre est possible depuis le 1er janvier 2009 (articles 477 et suivants du Code civil). Celui-ci permet de pallier les conséquences d’une altération de sa santé, de choisir son représentant futur et de prévoir précisément ses pouvoirs, évitant ainsi l’ouverture d’une tutelle ou d’une curatelle.
Objet du mandat de protection future
L’objet du mandat dépend de la volonté du mandant. Il peut porter uniquement sur la protection de la personne du mandant (vie personnelle, santé, relations aux autres, logement, déplacements, loisirs, etc.), ou sur la gestion de son patrimoine (actes d’administration sur les biens), voire les deux à la fois. Le mandat peut avoir une portée générale ou un objet plus précisément déterminé (entreprise, portefeuille de valeurs mobilières, etc.). Il permet également d’organiser par avance la protection d’un enfant mineur ou d’un enfant majeur handicapé (dans ce dernier cas, le mandat sera obligatoirement notarié).
Comment établir ce mandat ?
Il est possible d’établir soi-même le mandat de protection future, sur un formulaire type défini par décret*. Pour donner date certaine à l’acte, il y a alors lieu de le faire enregistrer par l’administration fiscale (coût : 125 €). Le mandat peut aussi être contresigné par un avocat ou établi par un notaire.
Le mandat conclu par acte notarié permet de confier les pouvoirs les plus étendus au représentant. Le tarif légal du mandat notarié est de 109,50 € HT – si le notaire effectue un travail particulier de recherche et d’expertise, il peut percevoir un honoraire fixé en accord avec le client – auxquels s’ajoutent 125 € de droits d’enregistrement. En effet, dans cette hypothèse, le mandataire pourra accomplir tous les actes conservatoires, d’administration et de disposition, sans autorisation particulière (louer un immeuble, vendre certains biens, accepter une succession …). Seule limite prévue par la loi : le mandataire ne pourra pas consentir une donation ou un legs portant sur un bien appartenant au mandant. Le mandant peut aussi restreindre les pouvoirs de son représentant dans le man-dat.
Lorsque le mandat est conclu sous seing privé (c’est-à-dire établi par le mandant sur le formulaire type ou contresigné par un avocat), les pouvoirs du mandataire seront cantonnés aux seuls actes conservatoires et aux actes d’administration nécessaires à la gestion des biens du mandant. Pour les actes de disposition, le mandataire devra obtenir une autorisation du juge des tutelles.
* Le formulaire type est téléchargeable sur www.vos-droits.justice.gouv.fr , formulaires pour les particuliers, rubrique tutelle.
Obligations du mandataire
À la prise d’effet du mandat, le mandataire a l’obligation de dresser un inventaire des biens du mandant. Il est tenu d’une obligation de conservation des documents et doit en outre rendre annuellement des comptes à la ou aux personnes chargées de contrôler sa mission, lesquelles sont, elles aussi, désignées dans le mandat (et doivent accepter cette mission de contrôle). Si le mandat est notarié, le notaire doit vérifier les pièces comptables transmises par le mandataire et alerter le juge des tutelles des mouvements de fonds suspect ou d’actes non prévus au mandat. Si le mandat est établi par acte sous seing privé, le mandataire présente au juge des tutelles ou au procureur de la République les pièces comptables justifiant sa gestion à première demande de ces autorités.
Modalités de mise en oeuvre
Le mandat pour soi-même prend effet lorsqu’il est établi que le mandant ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts. Le mandataire doit alors produire au greffe du tribunal d’instance du lieu de résidence du mandant, le mandat accompagné d’un certificat médical attestant de l’altération des facultés mentales ou corporelles du mandant, de nature à empêcher l’expression de sa volonté. Le greffier vise le mandat, date sa prise d’effet et le restitue au mandataire. Le mandat doit être notifié au mandant afin que ce dernier soit informé de sa mise en oeuvre ; si, à partir de là, c’est le mandataire qui représente le mandant, ce dernier reste néanmoins en mesure d’accomplir des actes juridiques. Le mandat pour autrui prend effet au décès du mandant (dernier des deux parents si le mandat a été donné par les deux) ou à compter du jour où il ne peut plus prendre soin de son enfant.
Peut-on modifier le mandat ?
Tant que le mandat n’a pas pris effet, le mandant peut le modifier ou le révoquer. Une fois mis en oeuvre, il ne peut plus être révoqué, mais il est possible de saisir le juge des tutelles pour contester sa mise en oeuvre ou les conditions de son exécution.
Fin du mandat
Le mandat prend fin dans les cas suivants : rétablissement des facultés personnelles du mandant, décès de la personne protégée, placement du mandant sous un régime de curatelle ou de tutelle, décès du mandataire, ou son propre placement sous un régime de protection, révocation judiciaire par le juge des tutelles s’il apparaît que l’exécution du mandat porte atteinte aux intérêts du mandant.
Alain Peloni, notaire honoraire pour Le Propriétaire Immobilier Juillet/Aout 2010
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