Comment s’assurer de la meilleure prise en charge en cas d’accident de la circulation ou d’agression, à l’étranger ?

Il est essentiel de s’informer sur ses droits et les démarches à entreprendre en cas d’accident de la circulation ou d’agression à l’étranger, même si instinctivement nous sommes peu enclins à collecter ce type d’informations lorsque tout va bien. D’autant que la nationalité française, sous certaines conditions, offre des droits en matière de prise en charge et d’indemnisation, bien plus importants qu’une assurance privée soumise à un plafonnement. Cependant, il est crucial de suivre des démarches précises pour en bénéficier.

Par Charles-Henri Coppet, avocat spécialiste en droit du dommage corporel, défense exclusive des victimes, Coppet Avocats

Savoir vers qui se tourner et quels documents sont indispensables pour être pris en charge à la hauteur des préjudices subis, est fondamental pour ne pas être victime une nouvelle fois.

 

Considérons l’accident de Monsieur B.

En 2020, Monsieur B, franco-marocain, conducteur d’un véhicule immatriculé en France, en vacances au Maroc, est victime d’un accident de la circulation sur une route de campagne. Un bus blanc roulant trop vite et venant de face l’oblige à se déporter pour éviter la collision. Après plusieurs tonneaux, Monsieur B sera pris en charge par les services de secours marocains et diagnostiqué d’une tétraplégie complète. Sa femme et ses enfants souffriront de séquelles mineures. Le responsable de l’accident, le conducteur du bus blanc, prendra quant à lui la fuite.
Une plainte sera déposée auprès des autorités de police sans mention de ce bus et de sa responsabilité. En l’absence de collision, les enquêteurs n’accorderont aucune importance à auditionner des témoins et à rechercher le bus, pourtant à l’origine de cet accident.

La prise en charge de Monsieur B.

Français, à l’étranger, non responsable de son accident, Monsieur B. pouvait prétendre à une prise en charge intégrale par le Fonds de Garantie des victimes des Actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI). Les imprécisions et omissions dans la plainte déposée vont pourtant remettre en question cette prise en charge : la preuve de la responsabilité du conducteur du bus blanc n’est pas fournie.

Outre la souffrance d’être rentré dans le monde du grand handicap, Monsieur B va se trouver victime d’une prise en charge initiale qui ne lui permettra pas de faire valoir ses droits.

Nous avons été sollicités plus d’un an après les faits et il était trop tard pour combler les lacunes de la procédure initiale. Vu la gravité du handicap de Monsieur B., nous avons quand même saisi la CIVI de Paris dont dépendent les français victimes d’infraction à l’étranger (Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions), qui était disposée à faire prendre en charge les conséquences du handicap de Monsieur B. mais qui n’a cependant pu que constater le manque de précisions de l’enquête initiale ne permettant pas à la victime de bénéficier des avantages de la loi française à laquelle elle était pourtant éligible.

Si la nationalité française offre une protection certaine et une indemnisation sans plafond, il est indispensable d’agir rapidement et de fournir des documents mentionnant précisément les circonstances des faits pour garantir une prise en charge intégrale.

Comment éviter la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui Monsieur B. ?

Le dépôt de plainte, après un accident de la circulation ou une agression, est capital. Il permet d’ouvrir un dossier auprès de la CIVI. La plainte de Monsieur B. n’aurait pas dû être signée en l’état : demander à ce que soit mentionnée la responsabilité du bus blanc était un droit. La plainte détermine légalement votre récit des faits. Chaque détail, même en apparence mineur, peut avoir un impact sur la recevabilité d’un dossier devant la CIVI. Il est important de se faire accompagner dans cette démarche, en premier lieu parce que la langue utilisée peut-être un obstacle d’autant que les traducteurs ne sont pas forcement disponibles au moment du dépôt de plainte. Il est formellement déconseillé de signer tout dépôt de plainte non traduit dans sa langue maternelle. Un détail mal traduit, mal retranscrit, peut jouer lourdement en votre défaveur.

Au-delà de la langue, s’assurer que toutes les informations nécessaires pour ouvrir un dossier de prise en charge, sont bien mentionnées, peut s’avérer ardu. Se faire accompagner par un représentant de l’UFE, un avocat spécialiste, les services consulaires ou encore les associations d’aide aux victimes, est indispensable pour s’assurer que ce document officiel sera conforme aux circonstances relatées.

En conclusion

Ce cas n’est malheureusement pas isolé. D’autres exemples, tels que les cas de Monsieur L. en Tunisie et de Monsieur V. en Inde, soulignent également les défis auxquels les victimes peuvent être confrontées en raison d’erreurs ou d’omissions dans les documents officiels : une attestation d’accident de circulation qui ne comporte pas la date de l’accident ou encore l’absence de mention de la qualité de passager de la victime.

En conclusion, être bien informé sur ses droits, agir rapidement après les faits, rassembler tous les documents légaux et médicaux, et se faire accompagner, sont des étapes essentielles pour vous garantir une prise en charge à la hauteur des préjudices subis. La nationalité française reste la meilleure assurance, en cas d’accident de la circulation ou d’agression à l’étranger, mais la diligence et la précision dans les démarches sont des facteurs clés pour une indemnisation juste.

 

La prise en charge des victimes françaises – expatriée, binationale, en déplacement professionnel, ou encore touriste – d’accidents de la circulation ou d’agressions à l’étranger est assurée par le Fonds de Garantie des victimes des Actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI) depuis 1990.

Cependant, il est nécessaire de respecter certains critères pour y avoir droit :

– avoir une incapacité totale de travail (ITT) égale ou supérieure à un mois,

– ne pas être responsable des faits,

– quel que soit le pays (hors Europe),

– que la victime ait ou non une couverture sociale,

– que le responsable ait été identifié ou non, soit assuré ou non.

Le droit à une prise en charge et à une indemnisation par le FGTI concerne donc les séquelles importantes : amputation, paralysie, traumatisme crânien…

Il est possible d’ouvrir un dossier jusqu’à 3 ans à compter des faits. Si la victime est mineure, ce délai court à compter de sa majorité.

A noter que les ayants droit peuvent également prétendre à une prise en charge au regard du préjudice subi indirectement et que ce qui vaut en cas de blessures résultant d’un d’accident de la circulation ou d’une agression, vaut également en cas de décès.

Si la prise en charge est assurée par le FGTI, c’est auprès de la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI), juridiction autonome qui se prononce sur la recevabilité du droit à être indemnisé, qu’il faut déposer un dossier. Plusieurs documents sont indispensables dont notamment la copie du dépôt de plainte relatant précisément les circonstances de l’accident et le compte rendu medical initial faisant état des séquelles de la victime.

(Photo ©@AdobeStock)

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