Troisième partie du dossier sur le Divorce à l’international. Après avoir déterminé quel tribunal était compétent et quelle loi était applicable, il convient de s’interroger sur la compétence et la loi applicable à l’égard cette fois des enfants, notamment quant à l’exercice de l’autorité parentale et à la pension alimentaire. Se pose également la question de la problématique du déplacement ou non retour illicite d’enfant.
Avant toute démarche, les Français résidant à l’étranger doivent être informés des difficultés juridiques relatives aux divorces transfrontaliers.
La question de la compétence et de la loi applicable se décompose en plusieurs volets :
I. L’organisation de la vie des enfants
– Le tribunal compétent
Dans l’Union Européenne
Si les enfants résident dans un Etat membre de l’Union européenne, la question est examinée au regard de l’article 8 du règlement européen « Bruxelles II bis » , lequel prévoit que le tribunal compétent est celui de l’Etat membre où réside habituellement l’enfant au moment où la juridiction est saisie. Ce règlement s’applique à toutes les décisions relatives à l’autorité parentale.
Attention, il existe des exceptions à cette règle générale lorsque l’enfant déménage d’un Etat membre vers un autre (article 9) ou lorsqu’il s’agit d’un enlèvement (article 10).
Hors Union Européenne
Si les enfants ne résident pas dans un Etat membre de l’Union européenne, ni dans un Etat ayant souscrit à la convention de La Haye du 19 octobre 1996 sur la responsabilité parentale, la compétence des tribunaux d’un Etat membre tel que la France ne pourra être fondée sur cet article. En revanche, l’article 12 du même règlement permet de soumettre au juge français saisi du divorce, la question de l’exercice de l’autorité parentale à deux conditions cumulatives :
– Si les deux parents ont donné leur accord express,
– Si l’intérêt de l’enfant le commande.
Dans un divorce conflictuel ces deux conditions peuvent être difficiles à réunir. En conséquence, il faudra s’interroger sur l’appartenance de l’Etat de résidence habituelle de l’enfant à la convention de La Haye du 19 octobre 1996. A défaut, il conviendra de revenir au droit français.
– La loi applicable
Lorsque le règlement Bruxelles II bis ou la convention de La Haye de 1996 est applicable, par principe, le juge compétent applique sa propre loi. Par conséquent, si le juge compétent est le juge français, il appliquera la loi française.
II. La contribution pour les enfants
– La compétence du juge français
Le Règlement obligations alimentaires permet au juge chargé du divorce ou d’organiser la vie des enfants de se déclarer également compétent concernant les questions relatives aux obligations alimentaires vis-à-vis des enfants.
Attention : ce n’est plus possible si la compétence du juge français pour organiser la vie des enfants n’est fondée sur la nationalité que d’une seule des deux parties (art. 3 d).
– La loi applicable à la contribution pour les enfants
Le Protocole de la Haye prévoit que la loi de la résidence habituelle de l’enfant, lequel est considéré comme étant le « créancier d’aliments », s’applique aux obligations alimentaires vis-à-vis de l’enfant. Ainsi, si la résidence habituelle de l’enfant se trouve en France, la loi française s’appliquera aux obligations alimentaires. Dans un tel contexte les aliments doivent être compris comme étant toutes les catégories de prestations dont une personne a besoin pour sa subsistance.
Il faut noter que le Protocole a été ratifié par l’Union Européenne mais ne l’a pas été par le Danemark et le Royaume-Uni. Il sera toutefois applicable même si la loi qu’il désigne est celle d’un Etat non contractant.
Par ailleurs, en cas de changement de résidence habituelle, il faudra se référer à la loi de l’Etat de la nouvelle résidence habituelle, à partir du moment où le changement est survenu.
Si la loi de l’Etat de la résidence habituelle de l’enfant n’accorde pas d’aliments aux enfants, alors la loi française pourra lui être substituée afin de lui assurer un droit à aliments, tel que le prévoient les articles 4-2 et 4-4 du Protocole.
Enfin, dans le cas d’un transfert de résidence de l’enfant en France, il est possible de se prévaloir de cette nouvelle résidence habituelle afin que la loi française soit appliquée.
III. Cas des déplacements illicites d’enfants à l’international
Il arrive que suite à une séparation, l’un des parents déplace les enfants vers un autre pays au motif d’un projet familial ou professionnel, et ce, sans l’accord de l’autre parent. Ainsi, un déplacement géographique peut être considéré comme étant illicite dès lors qu’il remplit les conditions visées par la convention applicable.
La France a ratifié plusieurs conventions multilatérales ou bilatérales avec de nombreux pays en matière de déplacement illicite ou de rétention illicite d’enfants à l’étranger.
La convention de La Haye du 25 octobre 1980 prévoit notamment que le déplacement ou le non-retour est considéré comme « illicite » lorsque :
– il a lieu en violation d’un droit de garde, attribué à une personne, une institution ou tout autre organisme, seul ou conjointement, par le droit de l’Etat dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non retour ;
et
– que ce droit était exercé de façon effective seul ou conjointement, au moment du déplacement ou du non-retour, ou l’eût été si de tels événements n’étaient survenus.
La notion de violation du droit de garde est quant à elle définie comme étant :
« le droit portant sur les soins de la personne de l’enfant et en particulier celui de décider de son lieu de résidence ».
Cela s’apparente à l’autorité parentale conjointe en droit français, à savoir un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant.
Dans un tel cas de figure se pose alors la question du retour de l’enfant au lieu de sa résidence habituelle.
Le retour de l’enfant au lieu de sa résidence habituelle.
La convention de La Haye de 1980 est applicable à tout enfant, peu importe sa nationalité, dès lors qu’il avait sa résidence dans un Etat contractant immédiatement avant l’atteinte au droit de garde ou de visite et dès lors qu’il n’a pas plus de 16 ans. Cette convention prévoit une coopération des autorités centrales de chaque Etat signataire pour assurer le retour de l’enfant illicitement déplacé au lieu de sa résidence habituelle.
Les autorités compétentes sont tenues de collaborer afin d’agir en urgence en vue du retour de l’enfant en prenant les mesures nécessaires à sa remise volontaire, puis en saisissant le tribunal de l’Etat contractant où l’enfant a été déplacé afin qu’il se prononce sur son retour.
Il est important de noter que seule une décision sur le retour peut être prise à ce stade, le juge ne pouvant statuer sur le fond du droit de garde.
De même, le règlement Bruxelles II bis prévoit un mécanisme permettant le retour immédiat de l’enfant dans son Etat de résidence habituelle et comporte des dispositions facilitant l’application des décisions de justice entre 27 Etats membres de l’Union Européenne, à l’exclusion du Danemark.
Maître Céline RICHARD
Avocat associé
Praticien du droit collaboratif
73, Av. Paul Doumer — 75116 Paris
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