[Fiscalité] François Barry Delonchamps, Président de l’Union des Français de l’étranger, répond à Anne Genetet, députée des Français établis hors de France de la 11ème circonscription.
Dans un message tweeter du 27 octobre 2020, Mme Anne GENETET, députée de la 11ème circonscription des Français installés hors de France, accuse l’Union des Français de l’Etranger, association reconnue d’utilité publique représentative des Français de l‘étranger, d’une « avalanche de fake news ». Le même jour, un communiqué de la même Anne GENETET développe toute une série d’accusations mensongères à l’égard de notre association.
Par respect pour nos adhérents et toutes nos représentations à travers le monde, qui s’engagent bénévolement au service des Français, durement frappés par la crise sanitaire et ses conséquences, il m’est impossible de laisse passer sans réagir des accusations aussi blessantes et injustes.
Je rappelle d’abord que l’UFE est une association reconnue d’utilité publique depuis 1936, représentative des Français de l’étranger. Notre association entretient des relations cordiales et courtoises avec les partis politiques, qui concourent à l’expression de la souveraineté nationale. Pour autant, l’UFE n’est affiliée à aucun parti ni à aucune confession religieuse. Elle ne se revendique d’aucune tendance philosophique particulière. Sa vocation est de rassembler tous les Français, de développer leurs liens, et de défendre leurs intérêts, ce qu’elle fait depuis sa fondation, avec comme mots d’ordre : « accueil, entraide, convivialité ».
L’UFE est à l’origine de tous les droits obtenus par les Français de l’étranger, qu’il s’agisse du droit de vote, du droit à une représentation politique à travers des sénateurs et des députés, de droits sociaux. L’UFE est donc amenée, comme elle le fait depuis sa fondation, à donner un avis sur toute question intéressant ses adhérents, les Français en général, et le rayonnement de notre pays.
1) Mme GENETET « déplore vivement les contrevérités une nouvelle fois assénées délibérément par l’Union des Français de l’Etranger, association dont les liens étroits avec le parti Les Républicains sont connus ».
Je viens de le dire, l’UFE n’entretient aucuns liens particuliers, encore moins « étroits » avec les LR, ni avec aucun autre parti politique ou confession religieuse. De nombreux adhérents à l’UFE sont certes membres d’un parti politique, y compris celui de Mme GENETET, ce qui est banal et se rencontrent dans toutes les associations, car cela relève d’un libre engagement personnel. Certains parlementaires, de différentes étiquettes politiques, nous font également l’amitié d’adhérer à l’UFE. L’UFE a d’ailleurs invité tous les députés élus en 2017 à rejoindre notre association, sachant que les parlementaires membres de l’UFE sont cordialement appelés, à l’invitation de son Président, à participer, avec voix consultative, à notre Conseil d’Administration. Certains y ont répondu très aimablement, et nous les en remercions. Certains ont participé à notre Assemblée Générale et y ont pris la parole. Ceci relève de la vie associative la plus normale.
Mais l’UFE ne donne aucune consigne de vote. Ses adhérents peuvent être candidats dans les partis ou sur les listes de leur choix, ou n’être pas candidats. Lors des dernières élections pour les Sénateurs des Français établis hors de France, en 2017, l’UFE a publié un communiqué indiquant qu’elle ne soutenait ni ne combattait aucune liste.
L’assertion de Mme GENETET est donc totalement inexacte. Personnellement, je me fais un devoir de n’adhérer à aucun parti politique.
2) Mme GENETET s’en prend à un article publié par l’UFE qui informait ses lecteurs d’un amendement adopté le 6 octobre 2020 en commission des finances de l’Assemblée Nationale sur la fiscalité des non- résidents, et donc des Français à l’étranger.
L’UFE considère en effet qu’il est de l’intérêt de tous de suivre et de comprendre ce que nos élus et le gouvernement préparent au sujet de la fiscalité des revenus des Français de l’étranger.
Mme GENETET écrit à ce propos : « l’auteur anonyme de cet article non signé soutient que l’amendement qu’Anne GENETET a fait adopter par l’Assemblée Nationale dans le cadre du budget s’inscrirait dans le dessein plus large de taxer selon la nationalité et non selon la territorialité, sans tenir compte que les Français de l’étranger sont aussi assujettis à l’impôt de leur pays de résidence ».
D’abord, pour répondre à une observation délibérément désobligeante, il n’y a pas d’auteur « anonyme ». Le site et les publications éditoriales de l’UFE relèvent de la responsabilité, que j’assume parfaitement, du directeur de la publication, c’est-à-dire du président de l’association.
Sur le fond, ce n’est pas l’amendement (qui n’est pas du seul fait de Mme GENETET – contrairement à ce qu’elle voudrait faire croire à ses électeurs – mais de plusieurs députés, dont elle-même, cités dans notre article), mais le projet initial depuis le rapport GENETET de 2018 sur la Mobilité internationale, qui cherche à introduire cette taxation à la nationalité, d’abord sur les revenus d’origine française, en les imposant au maximum en France, sans tenir compte des impôts dus dans le pays de résidence, comme le prévoient les nombreuses conventions fiscales bilatérales.
Je me permets de rappeler que ce Rapport de Mme GENETET sur la Mobilité Internationale des Français comportait une grande partie centrée sur la fiscalité des « contribuables français non-résidents », et en réalité n’appréhendait la fiscalité que sous un angle strictement national.
Parmi les propositions de ce Rapport, figure la recommandation n°9 que je cite : « permettre le partage du registre des Français établis hors de France avec des administrations exposées à des risques de fraude», et donc certainement avec l’administration fiscale.
Or il faut savoir que ce registre, institué par décret du 31 décembre 2003, a pour finalité exclusive la connaissance des communautés françaises aux fins de protection consulaire. L’inscription est une mesure d’information, garantie par la CNIL, vis-à-vis de laquelle l’administration a pris des engagements. On ne peut donc qu’être troublé par la proposition de Mme GENETET qui vise clairement à détourner une mesure d’information pour en faire une mesure de police, qui risque d’inciter nombre de nos compatriotes à se faire rayer de ce registre très utile pour eux et pour leur sécurité.
L’objectif d’un fichier des contribuables français à l’étranger est on ne peut plus clair. Pourquoi le nier ? Un débat à ce sujet serait salutaire.
3) Mme GENETET écrit que « la territorialité de l’impôt selon le pays de résidence n’est pas davantage une option : le seul prélèvement obligatoire actuellement territorialisé pour les Français de l’étranger est l’ensemble des prélèvements sociaux CSG-CRDS et PS sur les revenus immobiliers, injustement appliqués aux contribuables hors Union européenne. »
On passera sur le jargon technique (PS ne correspond à aucun prélèvement connu, mais peut-être le rédacteur pense-t-il au prélèvement de solidarité – PSOL). Je crains simplement que cette phrase ne soit difficile à comprendre, dans la mesure où le concept de territorialité de l’impôt- expression qui revient sans cesse chez Mme GENETET, s’applique aux sociétés, la loi ne prévoyant le principe général de territorialité de l’impôt que pour les sociétés, et non pour les personnes physiques.
Cette digression incompréhensible sur la « territorialité » ne doit pas faire perdre de vue l’essentiel : les prélèvements dits « sociaux « CSG-CRDS-PSOL, demeurent à la charge des contribuables qui ne résident pas dans l’Union européenne. Que s’est-il passé depuis 2017 pour mettre fin à ce scandale ?
Il est au demeurant inexact de préciser, comme le fait Mme GENETET, que ces prélèvements sociaux ne s’appliqueraient – certes injustement – qu’aux contribuables « hors Union européenne ». Sauf erreur de notre part, les contribuables concernés, même situés au sein de l’Union, sont soumis au Prélèvement de Solidarité de 7,5% sur leurs revenus fonciers et sur leurs plus-values immobilières. Si Mme GENETET ne le sait pas, eux le savent !
Mme GENETET ne prend pas non plus position sur les invraisemblables cumuls de discriminations institutionnelles qui frappent les Français de l’étranger, qui sont parfois assujettis à l’impôt et à la CSG dans leurs propres pays de résidence, y compris sur leurs revenus français. Rien de vraiment étonnant, si l’on se souvient que dans son rapport déjà cité de 2018, elle déplorait que « peu de citoyens français non-résidents contribuent à la richesse nationale : moins de un sur quatre paye un impôt sur un revenu perçu en France, tandis que 38% s’acquittent d’une taxe foncière « (page 11).
C’est bien la première fois que je vois l’impôt considéré comme une « richesse », alors qu’il constitue un prélèvement sur cette richesse. Ce lapsus est tout un programme !
4) Mme GENETET écrit ; « la réforme de la fiscalité en cours d’adoption maintient les règles en vigueur l’année dernière et cette année ; elle n’entraine aucune augmentation d’impôt pour quelque contribuable que ce soit ».
Elle ne dit pas que ceci résulte d’un rétropédalage suite à l’indignation qui s’est manifestée chez les Français de l’étranger.
5) Mme GENETET trouve, pour justifier les impôts payés par les Français de l’étranger un argument inédit : « l’offre de services publics, cette dernière étant constituée à l’étranger de nos postes consulaires accessibles à tout ressortissant avec ou sans revenu en France ».
Sans nier la qualité incontestable et le dévouement des services consulaires français, force est au contraire de constater que l’offre de services publics à l’étranger, à l’exception des services sociaux des consulats et des bourses scolaires (sachant que seul un enfant français sur trois peut accéder à une école française à l’étranger) est assez limitée, et sans comparaison avec les services publics financés en France par leurs impôts. J’ajoute que la taxe perçue pour la délivrance des passeports français, quatre fois plus élevée que le coût de revient de ce document, constitue un autre impôt, considérable pour les familles nombreuses, non négligeable et inévitable.
6) « Le taux minimum d’imposition applicable, selon Mme GENETET, aux revenus de source française évoqué dans l’article (de l’UFE) n’est appliqué qu’aux personnes refusant de déclarer leurs revenus mondiaux ».
Encore faudrait-il que le système du taux d’imposition global sur le revenu mondial soit applicable ! Les très hauts revenus, selon Mme GENETET, débutent à 27 519 euros, soit 2 293,25 euros par mois, ce qui relève d’une étrange conception des hauts revenus. Au-delà de ce seuil vertigineux, le taux est de 30%. Il y a donc bien une progression de l’impôt, qui est passé de 20% à 30% au-delà du seuil de 27 519 euros. C’est ce que Mme GENETET appelle « aucune augmentation d’impôt pour quelque contribuable que ce soit ». Et c’est l’UFE qu’elle accuse de mentir !
L’UFE n’a pas pour objectif de plaire ou de déplaire à quiconque. Elle remplit sa mission, au-delà des péripéties électorales. Elle informe les Français de l’étranger. Sa ligne éditoriale est celle du service de la communauté.
François BARRY DELONGCHAMPS
Président de l’Union des Français de l’Etranger
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