Divorce à l’international : quel tribunal sera compétent ?

Dès lors qu’un couple s’est expatrié hors de France pour des raisons personnelles ou professionnelles, cela entraine des conséquences en cas de séparation.
 
Lorsque l’un des époux réside à l’étranger ou si au moins l’un d’entre eux est de nationalité étrangère, il s’agit d’un divorce international. Les règles de droit international privé ont vocation à s’appliquer. 
Se posent alors les questions suivantes : quel tribunal sera compétent concernant le divorce ? Quelle loi sera applicable au divorce ?

A titre d’exemple, le juge français peut être compétent tout en étant tenu d’appliquer une loi étrangère. 
 
La procédure de divorce peut aussi être fractionnée entre plusieurs pays dont les juges ont la compétence pour statuer sur différents aspects de la procédure : sur les enfants, sur les obligations alimentaires, sur les aspects financiers etc…
 
Les Français installés à l’étranger doivent avoir une connaissance concrète du droit de la famille dans le cadre d’un divorce international. En effet, il n’est pas évident de savoir quel juge sera compétent ou quelle loi s’appliquera. Même résidant à l’étranger, il est très souvent possible d’engager une procédure en France. 

LE TRIBUNAL COMPÉTENT POUR LE DIVORCE

Dans l’Union Européenne  

La première étape consiste à se demander si l’un des époux a la nationalité de l’un des Etats membres de l’Union Européenne ou sa résidence sur le territoire de l’un de ces Etats. 
 
La compétence des juridictions françaises doit être appréciée sur le fondement du règlement européen « Bruxelles II bis  »  relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et de responsabilité parentale, lequel prévoit que les juridictions françaises seront généralement compétentes en matière de divorce et de garde des enfants : 
 
* Si l’une de ces conditions est remplie :
  • la résidence habituelle des époux se trouve sur le territoire français, 
  • la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d’eux y réside encore se trouve sur le territoire français,  
  • la résidence habituelle du défendeur se trouve sur le territoire français,  
  • en cas de demande conjointe, la résidence habituelle de l’un ou l’autre époux se trouve sur le territoire français, 
  • la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année avant l’introduction de la demande se trouve sur le territoire français, 
  • la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins six mois immédiatement avant l’introduction de la demande et qu’il est français se trouve sur le territoire français.  
* Si les époux sont tous les deux de nationalité française. 
 
Compte tenu du grand nombre de possibilités offertes, il est fréquent que les tribunaux de plusieurs pays puissent se reconnaître compétents. C’est pourquoi le règlement a prévu qu’en cas de saisine de juridiction d’un pays, la juridiction du pays saisie en second laissera la priorité à la première et devra se dessaisir du dossier. 
 
Dans ces conditions, l’un des époux peut avoir intérêt à saisir rapidement le tribunal de l’Etat dans lequel le droit national peut lui être plus favorable
 
Il est donc essentiel d’être informé, en amont, du droit applicable au divorce dans les différents pays potentiellement compétents.

Hors Union Européenne 

Dans l’hypothèse où le règlement européen n’est pas applicable, la compétence des tribunaux français sera déterminée par la loi française. L’article 1070  du Code de procédure civile  prévoit, par ordre hiérarchique, que les tribunaux compétents sont ceux : 
  • de la résidence de la famille,
  • de la résidence de l’époux qui a la charge des enfants mineurs, 
  • de la résidence de l’époux qui n’a pas pris l’initiative du divorce. 
La compétence française est déterminée par la résidence au jour où la requête initiale est présentée. En cas de demande conjointe, si l’un des époux au moins réside en France, et que les deux époux ont choisi de saisir les tribunaux français, le tribunal compétent sera, selon le choix des époux, celui du lieu où réside l’un ou l’autre. 
 
A nouveau, plusieurs tribunaux pourront être compétents et l’un des époux pourra avoir intérêt à saisir le tribunal du pays dont la loi nationale pourrait lui être plus favorable. Cela dit et à titre de rappel, le fait que la compétence des tribunaux d’un Etat leur soit reconnue ne suppose pas nécessairement que la loi applicable au divorce sera celle de cet Etat. 
 
Lorsqu’aucune de ces règles ne permet de fonder la compétence des tribunaux français ou d’un autre tribunal d’un Etat membre, il est toujours possible de fonder la compétence des tribunaux français sur les règles internationales de droit commun, à savoir les article 14  et article 15  du Code civil, sous réserve toutefois que leur mise en œuvre n’ait pas pour conséquence de conduire devant les juridictions françaises un ressortissant d’un Etat membre, à l’exception d’un défendeur de nationalité française. 
 
En vertu de ces textes, le juge français est compétent dès lors que le demandeur ou le défendeur est de nationalité française, il s’agit du « privilège de juridiction ». 
 
L’étape suivante consiste à déterminer la loi applicable au divorce. Cela fera l’objet d’un prochain article.
 
 
Maitre Céline Richard
Avocat spécialisé en droit de la famille interne et international
 
 
 
 
 
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